La recherche sur l’Arctique : transformation en devenir

La manière dont l’infrastructure numérique contribuerait à mieux cerner les réalités de l’Arctique

Un billet de Jim Ghadbane, président et chef de direction

Il y a peu, j’assistais à un « Petit-déjeuner avec des têtes à Papineau »* qui avait pour thème les changements dans l’Arctique – une région sur le point de connaître un bouleversement rapide, de même que ceux qui y vivent. En débattaient Susan Kutz, de l’Université de Calgary, et Jackie Dawson, de l’Université d’Ottawa, avec comme modérateur Pitseolak Pfeifer, porte-parole de la communauté inuit et candidat à la maîtrise en études nordiques à l’Université Carleton.

Les oratrices ont brossé un tableau des répercussions que l’évolution accélérée de l’écosystème aura sur les collectivités qui en dépendent. Quelques points à retenir :

  • l’Arctique se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète;
  • le climat plus tempéré élargit la zone où parasites et maladies prolifèrent, ce qui a un impact sur la faune;
  • l’insécurité alimentaire est un problème persistant dans l’Arctique, où les aliments importés coûtent extrêmement cher;
  • les populations inuit qui poursuivent leurs activités ancestrales constituent une ressource cruciale, mais inexploitée, qui nous permettrait de mieux comprendre ce que traverse l’écosystème arctique et comment le protéger.

En tant que professionnel des technologies de l’information, mon esprit a naturellement dérivé vers la manière dont l’infrastructure numérique contribuerait à mieux cerner les réalités de l’Arctique et à doter les Inuit des moyens avec lesquels ils pourraient demeurer dans leur communauté et s’y épanouir.

Voici donc ma réflexion. Imaginez un avenir où, partout dans l’Arctique, les Inuit continueraient de vivre dans leur collectivité et seraient devenus un maillon capital pour la recherche sur l’Arctique.

En effet, les gens du cru, qui exploitent le sol et chassent, armés de leur téléphone cellulaire, pourraient recueillir des données en temps réel sur à peu près n’importe quoi, de la température aux dimensions de la banquise, en passant par les migrations de la faune. De cette façon, ils pourraient rester dans leur communauté et éventuellement gagner un revenu en fournissant des données essentielles à une brochette d’utilisateurs – pas seulement des chercheurs, non, des administrations publiques et des acteurs du secteur privé qui portent un intérêt économique ou autre à l’Arctique.

La chose est réalisable, mais l’infrastructure numérique devra évoluer pour que cela se concrétise. On devra tirer parti des nouvelles technologies comme les satellites à orbite basse (SOB) qui facilitent les transmissions des téléphones cellulaires, et d’un robuste réseau en arrière-plan. Dans son dernier budget, le gouvernement canadien a réservé cent millions de dollars pour l’élaboration de technologies SOB, et le Canada a passablement progressé dans l’implantation d’un réseau, dans le Nord. Le projet Fiber Link, dans la vallée du Mackenzie, auquel collaborent l’administration des Territoires du Nord-Ouest, NorthwestTel et le groupe Ledcor, a aménagé un corridor de fibres optiques de 1 154 km allant d’Inuvik à McGill Lake dans les Territoires du Nord-Ouest. La connexion de McGill Lake au sud du pays ferait du scénario que je viens d’évoquer une réalité. Étant donné la distance et la nature du relief, pour y arriver, les partenaires des secteurs public, privé et sans but lucratif devront concerter leurs efforts, mais puisque le Canada s’est érigé en intendant de cet écosystème unique qu’est l’Arctique, pareil objectif ne vaut-il pas la peine d’être poursuivi, en dépit de l’éloignement?


*Pour ceux qui habitent dans la région d’Ottawa, cette activité mensuelle, sur la colline du parlement, est l’occasion d’en apprendre davantage sur les recherches les plus pointues tout en côtoyant les députés et en profitant d’un copieux petit déjeuner dans la magnifique salle à manger des parlementaires. L’évènement est organisé par le PFST (Partenariat en faveur des sciences et de la technologie) et CANARIE le parraine depuis longtemps. Plus d’informations à ce sujet ici.